Mon allocution à l’Institut de France

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Monsieur le chancelier, 

Mesdames et Messieurs, 

Jamais, je n’avais imaginé que je m’exprimerais un jour devant votre illustre assemblée. Il est donc inutile de vous dire à quel point l’émotion m’étreint en cet instant précis par l’honneur que vous me faites. 

 « Je vous supplie (donc) d’ajouter encore une grâce à celle que vous m’avez faite : c’est de ne point attendre de moi un remerciement proportionné à la grandeur de votre bienfait. »  

Ces mots, vous les avez reconnus, sont ceux de Jean de La Fontaine, prononcés à l’occasion de sa réception à l’Académie française, le 2 mai 1684. Permettez-moi en toute modestie et humilité de les avoir repris à mon compte, tant ma gratitude à votre égard est grande.

 A votre égard, oui, Monsieur le chancelier et Monsieur le directeur de France-Mémoire, d’avoir organisé cette séance extraordinaire et qui fait suite à nos rencontres à l’Assemblée nationale et à l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie. 

Je tiens à associer à ces remerciements Monsieur Ziad Khoury, préfet de l’Aisne. 

Bien mieux que je ne pourrais le faire, Monsieur le chancelier, vous avez trouvé les mots justes, précis pour célébrer l’homme que fut Jean de La Fontaine et son œuvre. 

La lecture des fables par vous, Madame Murielle MAYETTE, a été un véritable enchantement. Vous avez fait revivre en ces murs le génie vibrant de Jean de La Fontaine. Et les commentaires par Erik Orsenna, Laurent Pernot, Thomas Lecuit et Rémi Brague montrent à quel point l’œuvre de Jean de La Fontaine est plus complexe qu’il n’y paraît, les morales moins naïves qu’on ne pourrait le penser.

J’ai trop de respect et d’admiration pour votre belle institution et vos honorables qualités d’éloquence pour me lancer ici dans un discours de spécialiste littéraire ou linguistique. Les uns et les autres vous l’avez fait avec brio. Et c’est pour moi un vrai ravissement. Tout comme hier devant la statue de Jean de La fontaine, du Corbeau et du Renard au Ranelagh, avec la prestation de Patrick Dandrey, Président de la Société des Amis de Jean de La Fontaine que je tiens à remercier également, avec qui nous avons relancé à Château-Thierry, les Rencontres de Psyché. 

Merci à vous tous de faire vivre avec force l’hymne lafontainien comme l’aurait fait le regretté Marc Fumaroli.

Croyez bien pourtant que la vie et l’œuvre de notre fabuliste m’intéresse au plus haut point mais ce matin, je me contenterai donc de vous faire quelques confidences sur l’importante influence qu’a Jean de La Fontaine dans ma vie personnelle et à quel point les valeurs humaines exprimées par les morales ont guidé mon action politique : le goût du travail, la solidarité envers les plus faibles, la coopération nécessaire à la réussite de chacun, le respect des hommes et de la nature… 

Je suis, pour ainsi dire, né à l’ombre de Jean de La Fontaine. Comme lui, je suis un homme de Champagne, mon territoire chevillé au cœur. 

Célébrer le 400ème anniversaire de la naissance de Jean de La Fontaine   à Château-Thierryet à Paris c’est donc pour moi l’occasion de promouvoir la Cité des Fables dont j’avais rêvé un temps qu’elle devienne la capitale mondiale des fables.

Maire de Château-Thierry pendant 9 ans, j’ai souhaité que Jean de La Fontaine retrouve toute sa place au sein de la cité. D’abord, en rénovant de fond en comble sa maison natale et puis en plaçant la belle statue de Laitié au cœur de la ville. Elle accueille, depuis, les visiteurs et rappelle aux Castelthéodoriciens qu’ils sont les héritiers du fabuliste.  

Comme Jean de La Fontaine, je suis aussi d’abord et avant tout un homme de la ruralité et si je quitte ma campagne pour rejoindre Paris et l’Assemblée nationale, mon cœur reste attaché à ma circonscription pour laquelle je déploie toute mon énergie à son développement économique, social et culturel. Oui, je n’oublie jamais mes racines locales mais aussi mes origines sociales puisqu’ « on tient toujours du lieu dont on vient »

Enfin, ceux qui parmi vous me connaissent, vous savez que comme Jean de La Fontaine, « J’aime le jeu, l’amour… la ville et la campagne » mais la comparaison s’arrête là. Jean de La Fontaine était un fabuliste pédagogue, moi je suis un homme politique engagé.

C’est sans doute pourquoi j’aime citer des extraits de ses fables dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale pour renforcer mes interventions ; parce qu’au-delà de la qualité indéniable et de l’originalité des fables, il me paraît essentiel, dans un monde ébranlé par des crises multiformes, d’insister sur les morales politiques et sociales de Jean de La Fontaine. « Et là encore je sais que les petits pâtissent des sottises des grands »

Les morales font d’ailleurs écho aux valeurs prônées par les pères fondateurs de la Francophonie

Si Jean de La Fontaine aimait à dire « Diversité est ma devise », c’est sans doute qu’il avait aussi, comme aspiration, l’universalité des droits humains comme horizon ! 

Et je suis convaincu que c’est par la promotion du respect de la diversité linguistique et culturelle que le monde trouvera son unité et l’universalité à laquelle il tend encore maladroitement.

C’est pourquoi, en tant que Secrétaire général parlementaire de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie, je suis très attaché à promouvoir la langue française et le multilinguisme dans la vie quotidienne, la communication, la publicité, sur internet mais aussi dans les instances internationales. Et nous avons besoin de vous, mesdames et messieurs les académiciens, pour faire reculer le monolinguisme qui nous envahit, faire la promotion de la traduction et favoriser l’apprentissage des langues dans notre pays et partout en Europe. 

L’histoire de la langue française et son évolution s’inscrivent aujourd’hui au Château royal de Villers-Cotterêts qui deviendra, dès 2022, le point d’ancrage d’une expérience unique et ambitieuse : la Cité internationale de la langue française ; pierre fondatrice de la renaissance de notre territoire avec la définition d’un projet global qui se doit d’être éducatif, culturel et populaire avec une ambition très forte de lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme. 

Et comme il n’y a pas de hasard, 2022 sera aussi l’année de la commémoration du 500ème anniversaire de la mort de Joachim du Bellay à qui on doit Défense et illustration de la langue française, véritable plaidoyer en faveur de la langue française dans la littérature, 10 ans après l’ordonnance de Villers-Cotterêts. 

Puissent Jean de La fontaine, le fabuliste, aujourd’hui, et Joachim du Bellay demain, promouvoir davantage la langue française. Vous pouvez en tous cas compter sur moi pour soutenir la proposition de loi visant à réaffirmer la place fondamentale de l’Académie française, et lui donner tous les moyens nécessaires pour assurer la préservation de notre langue en perpétuelle évolution. 

Et encore une fois, ces orientation politiques je les dois à la lecture de l’œuvre de Jean de La Fontaine. 

Je sais que nous pouvons compter sur vous pour porter la langue française mais aussi faire la promotion de la diversité linguistique et la nécessaire solidarité entre les États en s’appuyant sur le multilatéralisme respectueux de la souveraineté des pays parce qu’il faut « s’entraider, c’est la loi de nature » et puis en ces temps troublés, tel le roseau, vous, académiciens, nous élus, plions, résistons mais surtout ne rompons pas.

Merci à vous de votre détermination.

Vive l’académie française, 

Vive la Francophonie 

Vive Jean de La Fontaine et au plaisir de vous accueillir à Château-Thierry, pour « champagner » ensemble. 

Je vous remercie.