Mobilisation du foncier en faveur du logement

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2ème séance : Mobilisation du foncier en faveur du logement (suite).

Compte-rendu de la séance :

M. Jacques Krabal.Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, l’Assemblée s’est déjà prononcée le 10 octobre sur ce projet de loi. Aujourd’hui, la situation a changé : le froid s’installe, avec les répercussions que l’on connaît pour les mal-logés. Mourir dehors, de froid, est inacceptable, où que l’on vive, et plus encore quand cela se produit en France.

Le plan hivernal que vous avez présenté le 14 novembre, madame la ministre, prévoit une augmentation de 12,7 % des crédits, portant ainsi l’enveloppe à 275 millions d’euros. Je tenais à rappeler ces chiffres, que l’on passe trop facilement sous silence dans ce contexte de crise des finances publiques, car je souhaite saluer ce choix politique. Cet engagement financier se matérialise ainsi dans le département de l’Aisne par des crédits supplémentaires, mais aussi et surtout par la création de 79 places d’hébergement d’urgence supplémentaires, ce dont je vous remercie.

Si je mets en avant ces aspects positifs, je n’ignore pas pour autant qu’en Île-de-France les foyers sont d’ores et déjà complets. Ce plan hivernal ne peut donc constituer une solution aux problèmes de logement que rencontrent nombre de nos concitoyens.

Si le chômage dépend souvent de la conjoncture internationale ou de logiques financières que nous réprouvons, nous sommes seuls responsables concernant le logement.

M. Jean-Noël Carpentier. Très bien !

M. Jacques Krabal. Il nous incombe de trouver des solutions pour loger tout le monde, même si je n’ignore pas la complexité de ce sujet. Nous le pouvons, et nous le devons, car la question du logement est essentielle pour le pacte républicain et le vivre-ensemble.

La loi que nous sommes appelés à voter a pour vocation d’accélérer la production de logements sociaux avec la libération du foncier public. Nous devons relever les défis d’un logement accessible à tous, quels que soient leurs revenus.

Je me permets de revenir sur trois points, déjà évoqués lors de mon intervention du 24 septembre.

Le premier, auquel je suis confronté en tant qu’élu, concerne la problématique du foncier, qui constitue un frein évident à la construction de logements. Ne pas le reconnaître serait faire preuve d’un manque de réalisme ; je salue donc la mise à disposition des propriétés de l’État aux collectivités.

Je souhaite cependant que nous allions plus loin, parce qu’il existe dans nos centres villes des espaces fonciers déjà viabilisés, disposant de réseaux, de services publics, de transports, et souvent même de bâtis, abandonnés par d’anciens services publics comme EDF, GDF, les ex DDE et bien d’autres encore.

Ces services publics ont quitté nos territoires, causant le préjudice que l’on sait à nos habitants. Le parc foncier qu’ils ont laissé devrait par conséquent, avec le soutien de l’État, revenir aux collectivités, même s’il est compliqué d’obtenir des réponses à nos demandes. Je sollicite donc le soutien de l’État afin de favoriser la construction de logements sur ces biens, qui sont souvent laissés à l’abandon, sans entretien. Cela constitue en effet un affront pour nos habitants, qui ne comprennent pas que d’anciennes sociétés ou grandes entreprises publiques puissent laisser se dégrader leur patrimoine, comme c’était le cas de l’État par le passé.

Le deuxième point concerne la continuité du dispositif Scellier. Lorsque je suis intervenu, des inquiétudes se sont fait jour ici ou là, et même des critiques, dénonçant l’abandon par la gauche de ce dispositif. Je ne partage pas les remarques formulées à ce sujet par MM. Daubresse et Apparu, et me réjouis au contraire de l’adoption le 15 novembre dernier du nouveau dispositif Duflot.

Ce dispositif, au-delà du seul aspect de l’exonération fiscale, revêt un caractère social évident, nouveauté dont je ne peux que me satisfaire. Il propose en effet la location à un tarif intermédiaire – 20 % de moins que la moyenne du marché – et un engagement de durée de location porté de 9 à 12 ans à des locataires dont les ressources ne doivent pas dépasser un plafond déterminé ; autant d’éléments qui soulignent les différences existant entre les dispositifs de Robien et Scellier d’hier, et le Duflot de demain.

Toutefois, il me semble important de revenir sur la question du zonage, qui avait été examinée ici même lors de la séance du 16 novembre, lors du débat sur l’amendement n° 667. Il est en effet prévu que des dérogations puissent être obtenues auprès des préfectures pour les communes situées en zone B2. Madame la ministre, ces dérogations ne pourraient-elles pas être étendues à certains territoires dits « en tension », mais situés en zone C ? Car il en existe !

Nous pouvons comprendre votre proposition de restriction des zonages pour les territoires les moins tendus, afin d’éviter la construction de logements ne trouvant pas de locataires. Mais il est urgent de repenser le zonage de façon cohérente et de l’actualiser en fonction des besoins démographiques. Dans ma circonscription, de nombreuses communes rurales sont classées en zone B2, alors que des communes situées entre Paris et Reims, avec une croissance démographique forte, sont en zone C. Quand comptez-vous mettre en place la révision de ces zonages, et à quelle échéance ?

N’oublions pas que ce dispositif, avec des investissements financés par des fonds privés, nous permettra d’atteindre l’objectif de 500 000 logements. Il est de plus générateur d’emplois pour le bâtiment, secteur qui aujourd’hui en a bien besoin.

Il reste encore beaucoup à faire dans ce dossier pour permettre à chacun de bénéficier d’un logement décent ; et la route est longue et sinueuse. Rappelez-vous, madame la ministre, ce que disait Jean de la Fontaine dans la fable L’Horoscope : « On rencontre sa destinée souvent par les chemins qu’on prend pour l’éviter » – un vers qui correspond parfaitement à notre situation ; alors ne renonçons pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Très bien !