Dans le cadre du débat sur le programme de stabilité 2016-2019, je suis intervenu en alertant le gouvernement à propos de la baisse des dotations des finances publiques. En effet, les petites villes sont asphyxiées et ont le plus grand mal à investir. A cela s’ajoute l’injustice des valeurs locatives souvent surévaluées en centre-bourg.
L’intervention en vidéo :
Le compte-rendu des débats :
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
M. Jacques Krabal. Le Parlement s’apprête à examiner le nouveau programme de stabilité. Les perspectives de réduction du déficit sont supérieures aux dernières prévisions, ce qui constitue une excellente nouvelle. Avec 11 milliards d’euros de baisse des dotations de l’État aux collectivités, les territoires prennent toute leur part à cet effort. Mais ces baisses pénalisent fortement les collectivités, en particulier les communes rurales et les petites villes centres. Pour la seule ville de Château-Thierry, la dotation globale de fonctionnement a diminué de 40 % en quatre ans tandis que, dans le même temps, les charges obligatoires, elles, ne cessent de croître : revalorisation réglementaire des rémunérations, réforme des rythmes scolaires, dégel du point d’indice.
Par ailleurs, le Gouvernement s’était engagé à compenser les abattements liés à la politique de la ville au moyen de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, au profit des bailleurs. Il n’en compense finalement qu’une petite partie. N’est-il pas temps, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, de mettre fin à la baisse des dotations, qui pénalise tant l’investissement sur nos territoires ? N’est-il pas temps, également, de s’attaquer enfin à la révision des bases d’imposition locales ? Ce dernier chantier a été ouvert par la dernière loi de finances rectificative pour 2010, dont les dispositions ont été modifiées à plusieurs reprises, entraînant des reports d’application. Pour prendre l’exemple de Château-Thierry, la question des valeurs locatives y est cruciale. Bien que, depuis sept ans, nous n’ayons pas augmenté les taux, ces valeurs demeurent très élevées, et nous assistons à une progressive désertification du centre-ville au profit des communes voisines. Quelles sont vos propositions pour faire face à ces injustices anciennes ? Le niveau de fiscalité des centres bourgs, souvent plus élevé, caractérisé par des charges de centralité, sera-t-il pris en compte comme paramètre pour la fixation de la dotation globale de fonctionnement, la DGF ?
Nos concitoyens ressentent beaucoup d’injustice en constatant que les références de valeurs locatives utilisées n’ont souvent rien à voir avec la valeur réelle de leur bien immobilier, d’autant plus qu’il existe des différences très importantes d’une commune à l’autre. N’est-il donc pas temps de profiter de l’accalmie budgétaire pour engager cette réforme et assurer une plus grande justice fiscale au niveau local ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je vais répondre précisément aux questions de M. Krabal en donnant quelques éléments sur les finances locales.
Premièrement, l’an dernier – je tiens à votre disposition les chiffres sur l’exécution budgétaire de l’année 2015 –, malgré la baisse d’environ 3,5 milliards d’euros des dotations de l’État, les recettes globales des collectivités territoriales ont progressé en moyenne de 1,5 %. Je parle là des recettes réelles de fonctionnement. Les dépenses réelles de fonctionnement ont également augmenté, de l’ordre de 1,46 %.
Notre objectif était de faire baisser les dépenses de fonctionnement. Il est en grande partie atteint : les dépenses de fonctionnement des collectivités augmentaient généralement de plus de 3 % par an, elles n’ont augmenté – c’est une réaction logique à la baisse des dotations – que de 1,5 %. Il faut bien avoir ce premier élément en tête.
Le dynamisme naturel des recettes de fonctionnement s’explique par l’évolution de la fiscalité directe – la CVAE, cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, les taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, la taxe d’habitation – et de la fiscalité indirecte – la TICPE, taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers.
Je rappelle que les valeurs locatives ont été augmentées forfaitairement de 0,9 % par le Parlement – une proposition vis-à-vis de laquelle le Gouvernement était resté neutre. Tout cela explique que les recettes aient continué de progresser. J’y insiste : nous avions annoncé qu’elles resteraient stables, et elles ont même progressé.
Des questions se posent quant aux capacités d’investissement des collectivités locales. Je n’ai que deux minutes de temps de parole : je ne rappellerai donc pas, à ce sujet, les mesures prises concernant le fonds de compensation de la TVA et le fonds exceptionnel de 1 milliard d’euros destiné à soutenir l’investissement. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
Vous avez évoqué la question des bases des valeurs locatives. Concernant les locaux professionnels, la dernière loi de finances prévoit, pour l’année prochaine, l’application des valeurs révisées, qui sont l’aboutissement d’un travail de longue haleine auquel de très nombreux élus ont participé. Pour les locaux professionnels, c’est donc chose faite ; pour les locaux d’habitation, c’est en cours, sur le même modèle : cinq départements pilotes ont été choisis, et un rapport d’expérimentation sera rendu. Nous voulons, bien entendu, généraliser cette réforme à l’ensemble du territoire, mais à cause de la complexité du dispositif, cela prendra un certain temps. Pour les raisons d’équité que vous avez bien décrites, cela reste toutefois essentiel.