Audition de Jean-Marc Ayrault par le groupe RRDP

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Voici l’intervention que j’ai prononcée à l’occasion de
l’audion du premier ministre par le groupe RRDP: Monsieur le 1er
Ministre, c’est un grand honneur pour moi de m’adresser à vous ici
à l’Assemblée nationale. Je ne fais pas de la politique avec un
plan de carrière qui m’aurait amené à concevoir que je me
retrouverais un jour, en tant que parlementaire, à échanger avec le
1er ministre de la république de la France. Enfant d’ouvriers, issu
du monde rural, Fils du peuple, je n’ai jamais nourri d’autre
ambition que de porter sa voix là où il m’arrive de penser qu’on
oublie parfois de l’écouter. Dans chacun de mes mandats, qu’il
s’agisse d’une petite commune rurale puis celui de celui de
Conseiller Général hier, de ceux de Maire de Château-Thierry et de
Député de l’Aisne aujourd’hui, fidèle à mes origines et à la parole
donnée, j’ai toujours mis un point d’honneur à respecter mes
engagements. Pourquoi ? Tout simplement parce que là d’où je viens,
toute promesse se fait en connaissance de cause et a valeur de
serment. Nous avions promis le changement pour maintenant. C’était
il y a 10 mois. On devait s’attaquer au monde de la finance, qu’en
est-il ? En Europe, toutes les politiques publiques passent sous
les fourches caudines des marchés financiers. Ils sont devenus la
mesure de toute chose. Comment admettre qu’à 3,7 % de déficit
public notre pays soit en « faillite », les Français soient
contraints de se « serrer la ceinture » encore et encore, et que à
3 % tout aille mieux ? L’austérité qui ne dit pas son nom, est
imposée aux pouvoirs issus de suffrage universels. Il y a 10 mois,
les Français ont voulu un changement radical, un autre système, une
nouvelle ère. Il y a tout à craindre de les décevoir définitivement
en ne leur montrant pas clairement que c’est l’objectif que nous
nous assignons. Ainsi où en est-on de la lutte effective contre les
inégalités qui passe nécessairement par une réforme fiscale de
grande ampleur, voire, comme certains l’ont qualifiée : par
unerévolution fiscale ? Quels seront les dispositifs visant à
réparer l’injustice dont pâtissent les PME, les commerçants qui se
voient beaucoup plus taxées que les multinationales qui se
soustraient à l’intégralité de l’impôt sur les sociétés grâce à
l’optimisation fiscale ? Qu’en ira-t-il des centaines de niches
fiscales et sociales qui cachent autant de privilèges inacceptables
dans des moments où chacun ne devrait être mis à contribution que
dans l’exacte proportion de ses moyens ? La question de
l’accompagnement de nos commerçants et de nos artisans est
également un sujet crucial car en milieu rural surtout, ils
contribuent pour une part non négligeable au maintien de l’emploi.
Que dire des ouvriers, des salariés pénalisés par la suppression de
la défiscalisation des heures supplémentaires, dans un contexte de
baisse du pouvoir d’achat et de hausse ininterrompue du chômage
depuis des mois ? Que dire encore des classes moyennes que nous
devions protéger, des retraités certes imposables fiscalisés à
hauteur de 0,3 % pour l’allocation d’autonomie ? Je pense que la
gauche a quelque chose à dire et bien plus à prouver. Je nous
exhorte à faire preuve d’audace et à renouer avec nos valeurs
historiques que j’ai chevillées au corps : la solidarité ; la
justice ; l’égalité de condition ; la laïcité et le souci de
laisser à nos enfants et à nos petits-enfants un monde meilleur que
celui dans lequel nous vivons. Je suis certain que notre famille
politique porte naturellement en elle les valeurs de progrès à la
condition qu’elle refuse leur dévoiement au nom d’un modernisme qui
cache à grand peine une formidable régression. Je suis de nature
optimiste et de caractère opiniâtre et je garde donc espoir que
l’on prenne en ces temps difficiles toute la mesure des réformes
que les Français attendent le plus rapidement possible avant qu’il
ne soit trop tard.

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