Délocalisations : question à M. Arnaud Montebourg

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Il y a quelque chose de profondément inique à voir des entreprises très rentables, quitter le territoire en mettant au chômage leurs salariés, pour revenir y vendre la production qu’elles ont transférée dans une filiale. L’exemple de GEA Farm Technologies à Château-Thierry en est la triste illustration. Avant que ce ne soit trop tard j’ai donc demandé à Monsieur Arnaud Montebourg, ministre de l’économie et du redressement productif à ce que le gouvernement s’implique dans ces négociations pour protéger nos emplois.

L’intervention en vidéo :

Compte-rendu de la séance :

M. Jacques Krabal. Monsieur le ministre, le groupe GEA emploie 18 000 salariés dans le monde. À Château-Thierry, 350 personnes y travaillent, réparties en quatre segments spécialisés dans la production d’équipements agricoles à forte valeur ajoutée. Certains ont moins de cinquante salariés, ils sont juridiquement indépendants, mais liés les uns aux autres par leurs activités. Les compétences développées localement ont permis à ce groupe d’être très compétitif sur son segment de marché.

Cela étant, le directeur de l’unité GEA Farm Technologies annonce brutalement le transfert de la production vers la filiale du groupe Royal de Boer, installée au Pays-Bas. Après l’information de la construction d’une usine en Chine, vous comprendrez que cela suscite des interrogations et des inquiétudes pour les employés et pour les élus.

Nous savons que ces transferts d’activités envisagés préfigurent souvent des délocalisations et des fermetures d’usines. L’État, comme les collectivités locales et les salariés, ne saurait être mis devant le fait accompli, sans explications. C’est pourquoi nous vous avons sollicité pour organiser une rencontre avec les responsables de ce groupe dans les meilleurs délais. Ce rendez-vous ne semble pas couler de source et pourrait même nous être refusé. Je tiens à souligner ici, monsieur le ministre, la disponibilité de vos collaborateurs et la réponse très rapide qu’ils nous ont fournie.

Il y a quelque chose de profondément inique à voir des entreprises très rentables quitter votre territoire en mettant au chômage leurs salariés, pour revenir y vendre la production qu’elles ont transférée dans une filiale. Vous comprendrez ma réticence à mettre en œuvre des dispositifs – tels que le CICE ou la diminution des charges – pour les grands groupes et les multinationales, qui les transforment trop souvent en dividendes supplémentaires versés aux actionnaires, plutôt que de maintenir ou développer l’emploi.

En effet, la financiarisation de l’économie voit sa logique se généraliser pour être à l’œuvre dans toutes les entités productives de notre société. Il est inadmissible de constater cette forme de chantage au déménagement qu’exercent nombre d’entreprises sur le terrain.

Monsieur le ministre, j’aimerais que vous puissiez nous indiquer les dispositifs que vous comptez mettre en œuvre pour empêcher ces pratiques qui, tant qu’elles restent possibles, semblent freiner notre redressement productif et notre capacité à réduire le chômage.

Mme la présidente
. La parole est à M. le ministre.

M. Arnaud Montebourg, ministre. Monsieur le député, la sous-préfète de votre arrondissement a reçu avec vous le dirigeant du site de GEA à Château-Thierry. C’est un site spécialisé dans la branche traite manuelle, et ce marché est un peu en difficulté au regard des robots de traite laitière.

Ce sur quoi nous sommes d’accord, monsieur le député, c’est qu’aucune décision n’est prise à ce jour. Il y a une réflexion en cours au niveau européen, pour rapatrier la production sur le site en Hollande. Ce n’est donc pas un site à bas coût ; il s’agit plutôt d’une restriction des capacités de production.

Nous souhaiterions connaître l’état d’esprit du groupe au plan européen. Nous allons prendre contact avec eux et accompagner l’entreprise pour faire en sorte que les décisions soient les moins désagréables possible pour la France – c’est ce que nous faisons en toutes circonstances.

Les entreprises acceptent de discuter, dès lors qu’on met les problèmes sur la table et qu’on cherche à les résoudre ensemble. Elles apprécient même que l’État ne joue pas les abonnés absents, car elles ont intérêt à continuer leur développement. Cette méthode, que nous avons mise en œuvre avec les commissaires au redressement productif, et avec la cellule restructuration de mon cabinet, est une méthode éprouvée avec laquelle nous avons obtenu des résultats positifs.

Certes, il y a parfois des échecs – qui n’échoue pas ? –, mais il est tout à fait possible de trouver des points d’accord avec des entreprises, surtout lorsqu’elles connaissent des difficultés. C’est à nous de trouver les moyens de les surmonter avec elles.

Monsieur le député, nous vous donnerons, au prochain rendez-vous les informations nécessaires, comme nous le faisons traditionnellement avec les élus des territoires.